pharma|\|ë|2[)

Comment gagne-t-on de la monnaie avec un produit gratuit ?

Première publication : 2015-02-28 samedi

Dernière modification : 2021-06-15 mardi

Certains opposent le logiciel libre et la monnaie. En effet, la question qui vient à l'esprit quand on découvre le logiciel libre est la suivante :

« Mais comment gagne-t-on de la monnaie avec un produit gratuit ?! »

Un logiciel n'est pas un produit

C’est plein d’autres choses, on peut par exemple le voir comme une œuvre.

On n’achète jamais un logiciel, même privateur (non-libre). En effet, dans le cas d’un logiciel non-libre, l’utilisateur achète éventuellement une licence, c’est-à-dire la permission d’utiliser le logiciel, accordée par l’ayant-droit.

Or, dans le cas d’un logiciel libre, ce droit d’utilisation est accordé à tous sans restriction. Ainsi, ce n’est pas qu’un logiciel libre soit gratuit, c’est que ça n’a pas de prix !

L’économie de service

L'économie du logiciel libre est une économie de services. En effet, gagner de la monnaie en rendant des services informatiques basés sur du logiciel libre, c'est possible et c'est d'ailleurs vivement encouragé par la Fondation pour le Logiciel Libre (FSF).

À ceux qui se demandent ce que sont les services informatiques : on peut les classer en trois branches :

  1. L'installation de logiciels libres et la maintenance des ordinateurs tournant sous logiciels libres.
  2. La formation aux logiciels libres (ainsi que le conseil).
  3. L'intégration. C'est-à-dire le développement sur commande de fonctions nouvelles, voire de logiciels libres complets, autour des logiciels libres existants.

Et ces trois façons de gagner de la monnaie dans l'informatique s'ajoutent à la vente de matériel (qui est une véritable économie de biens).

Le professionnel du Logiciel Libre gagne-t-il autrement de la monnaie qu’un restaurateur, un juriste ou un médecin ?

Et c'est flagrant !

Dans le domaine de la restauration, les droits exclusifs sur les recettes réservés à leurs inventeurs, ça n'existe pas ! Et pourtant, on trouve des tas de restaurants (et pas que des petites gargotes qui vivotent) ou des magazines de cuisine. Il y a même des émissions de télé-réalité sur la cuisine ! C'est bien la preuve du dynamisme du secteur !… Bref, la recette libre, ça marche !

Dans le domaine du droit, les droits exclusifs sur les articles de lois réservés à leurs auteurs, ça n'existe pas ! Imaginez-vous payer votre utilisation d'un article de loi ? Il faudrait pourtant penser aux pauvres héritiers de nos braves députés 70 ans après leur mort, non ? En réalité, l'outil de travail des juristes (la loi, la jurisprudence…) est libre (car « nul n'est sensé ignorer la loi »). Et l'avocat rend des services (conseils juridiques, défense au tribunal etc.) et se fait payer pour ça… Bref, la loi libre, ça marche !

Dans le domaine de la médecine, les droits exclusifs sur les maladies réservés à leurs découvreurs, ça n'existe pas ! Plutôt que de vendre ses ordonnances (plus ou moins cher selon ce qu'il a prescrit, ou selon le prix à rentabiliser de la licence lui donnant le droit de soigner telle maladie), le médecin généraliste gagne de la monnaie avec des services (le diagnostic, la prescription et l'acte) basés sur des connaissances médicales qui relèvent de la Science, donc qui appartiennent à tous. Autrement dit, sur des connaissances libres 1Et la médecine libre, ça marche !

Chacun reconnaît que ces trois secteurs économiques sont loin d'être en crise.

Et ce serait injuste de faire autrement !

Chacun reconnaît également qu'il serait malhonnête de gagner de la monnaie :

  • en cuisinant des recettes non-libres sur lesquelles il est rendu impossible, par des voies tant légales que techniques, d'effectuer une analyse indépendante, entre autres graves dysfonctionnements pourtant courants en informatique,
  • en revendant des droits d'utilisation d'articles de loi non-libre,
  • ou en revendant des droits à soigner.

Cela constituerait de véritables arnaques envers la société toute entière ! 2 Cela conduirait à des oligopoles, étouffant la concurrence et l'innovation, et abusant des consommateurs, comme on le constate dans l'informatique privatrice. La restauration non-libre, la loi non-libre, la médecine non-libre, ça ne marche pas !

Si ça existait, ce serait interdit. Car la nourriture, la loi ou la médecine sont trop importants pour la société pour que celle-ci se permette de les bloquer en réservant à certains des droits exclusifs (et intemporel en pratique) sur tout ou partie de ces domaines.

Puisque l'informatique transcende déjà toute la société de manière similaire au trois domaines auxquels nous la comparons, il devrait être inimaginable que quiconque gagne de la monnaie avec du logiciel privateur. Le logiciel privateur devrait être interdit.

Et un tel arbitrage dans la restauration, le droit ou la médecine, a t-il freiné l'innovation ou empêché une économie florissante de s'y développer ? Non, puisque c'est l'exact contraire qui s'est passé.

Actuellement, ça peut sembler dur de gagner de la monnaie avec le logiciel libre, et c'est certainement le cas…

Mais une activité économique de ce type se développera bien plus facilement lorsque les gens, les entreprises et les administrations auront totalement cessé de dépenser leur monnaie dans le logiciel privateur, c'est-à-dire de le jeter par les Windows.

En conclusion

D'abord, plus personne ne devrait s'étonner qu'un informaticien gagne de la monnaie dans le logiciel libre : il le fait simplement de la même manière qu'un cuisinier, qu'un juriste ou qu'un médecin : en rendant des services. (Et il peut aussi vendre du matériel.)

Mais ensuite, la question à se poser ne doit plus être « Comment gagne-t-on de la monnaie avec des logiciels libres ? » mais plutôt « Comment peux-t-on laisser des gens gagner de la monnaie avec des logiciels non-libres ? »

Car si la société libre ne peut pas tolérer la cuisine non-libre, le droit non-libre, ou la médecine non-libre ; la société libre ne peut pas non plus tolérer le logiciel privateur.

Pour aller plus loin

On peut lire :

Notes de bas de page:

1

Les connaissances médicales sont en effet libres bien qu'elles ne soient pas aussi accessibles qu'elles le pourraient à l'ère d'Internet. Mais ça viendra ; c'est d'ailleurs le combat de l'Open Access.

2

Comme Roberto di Cosmo, on peut voir également le logiciel privateur comme un hold-up planétaire.

Moi CC-BY-SA

Send me an email.

I love Free Software Free Software, Free Society Datalove Liberté professionnelle Privacy Journée internationale contre les DRM

© Nicolas Floquet - CC-BY-SA | Site édité sous Emacs 28.2 (Org mode 9.5.5), presque auto-hébergé chez Grifon avec Debian et Nginx. Thème graphique dérivé de Dark & Blue.